TINA • there's nothing cheap as words

La jeune femme fit une grimace alors qu’elle observait les différentes tenues face à elle. Une petite robe noire descendant jusqu’aux genoux mais soulignant sa taille ou robe courte à fleurs bleues coupe péplum. Il y avait des soirs où elle se rendait compte qu’elle n’avait absolument rien à porter quant bien même son dressing puisse occuper une pièce en entier. Ou du moins les trois quarts de cette dernière pensa-t-elle lorsque son regard s’égara du côté des vêtements de son colocataire et meilleur ami. Avait-il réellement besoin d’entreposer ses affaires ici après tout ? Tout gentleman devait pouvoir laisser le pas à la demoiselle. Mais Aiden n’était pas un gentleman. « Qu’est-ce que tu fais ? » Les mains sur ses hanches, habillée d’une simple nuisette, elle ne se démonta pas pour autant en se retournant vers celui qui venait d’occuper ses pensées. Un point pour lui : il ne cilla pas plus qu’elle en dépit du fait qu’elle soit si peu vêtue. Mais après tout, ce n’était pas comme si ce n’était pas la première ou dernière fois ou qu’il ne l’avait pas déjà vue entièrement nue sous toutes les coutures. Elle poussa un petit soupir de frustration et haussa les épaules en promenant de nouveau son regard sur les robes qui avaient retenues son attention pour ce soir. « Je ne sais pas quoi mettre ce soir. » Prenant une moue d’enfant, elle se balança sur ses jambes espérant qu’il comprenne et fut ravie lorsqu’elle l’entendit soupirer et se rapprocher, saisissant une tenue dans son placard. « Met ça. » Elle déchanta cependant en constatant qu’il lui avait choisi un pyjama en pilou pilou bien peu seyant en boîte de nuit. Haussant un sourcil pour le moins dubitatif, elle l’interrogea du regard. Ils n’avaient nul besoin de parler entre eux mais il prit tout de même la peine d’exprimer sa pensée. « Tu ne sors pas ce soir. » Elle laissa tomber le pyjama et croisa les bras, faisant aller ses doigts avec impatience, attendant clairement des explications qui ne venaient pas et n’allaient pas venir au vu des pas d’Aiden s’éloignant d’elle comme si de rien n’était. « Pardon, j’ai perdu le mémo où tu es devenu ma mère. »

Elle le suivit, les sourcils froncés et laissa exprimer son agacement en le voyant, quant à lui glisser sur ses épaules son manteau. « Tu ne sors pas cette nuit. Tu restes enfermée et tu n’ouvres à personne. » « Pardon, mais j’ai également perdu le mémo où tu étais aussi devenu mon père. Tu deviens ridicule, Aiden, ces derniers temps. » Cela faisait quelques semaines déjà que quelque chose avait changé entre eux. Elle le savait pertinemment tout comme elle savait qu’il ne l’ignorait pas non plus. Il était plus fatigué. Il était plus irritable que jamais. Spécialement de manière mensuelle et si elle n’en avait pas été elle-même témoin, elle aurait pu développer des théories selon lesquelles Aiden était en vérité Adrianna mais que ses parents n’avaient jamais voulu accepter le fait d’avoir une fille et non un fils. Malheureusement, elle savait de source sûre qu’il ne possédait définitivement pas de vagin. « Tu crois que je suis aveugle Aiden ? Tu crois que je ne vois pas ce qu’il se passe ? Tu disparais une fois par mois toute la nuit, m’intimant de rester enfermée pour je ne sais quelle raison. Tu reviens au petit matin, couvert d’écorchures, sale et sentant le fauve. Je sais ce que tu fais… » Elle n’eut pas le temps de terminer sa phrase qu’elle se retrouva soulevée, ses pieds ne touchant plus le sol alors que des mains puissantes et masculines se glissaient le long de l’arrière de ses cuisses et qu’elle était plaquée violemment contre le mur. Au moins, cela la fit se taire, ne serait ce qu’à raison du baiser enflammé qu’elle reçu de la part du jeune homme, la laissant à bout de souffle et glacée lorsqu’il  la relâcha en claquant la porte derrière lui.

Elle avait finalement choisi sa tenue pour la soirée. Total look noir. Elle avait également choisi ses festivités et elle pesta en silence contre Aiden. Quelle idée avait-il de se faufiler dans les bois canadiens comme ça. Il allait passer un sale quart d’heure lorsqu’elle allait le retrouver et lui dire ses quatre vérités. Finalement, elle distingua une silhouette au loin qu’elle ne connaissait que trop bien et s’approcha victorieuse. « Je t’ai eu ! » s’enthousiasma-t-elle en lui sautant sur le dos. Elle n’était cependant pas prête à une telle réaction de sa part lorsqu’il la rejeta violemment et leva la main comme pour la frapper. Elle ne s’attendait pas davantage à ce qu’elle voyait devant elle. Oui, il ne prenait pas toujours particulièrement soin de son apparence mais il n’était pas aussi barbu quand il était parti. Et ces yeux n’avaient jamais été jaunes. Et son visage … Son regard glissa sur la pleine lune qui éclairait la clairière. Finalement, elle comprit mais c’était trop tard.

« Installe-toi. J’arrive. » La jeune femme posa ses mains sur les épaules de Jérémy alors qu’il s’installait dans leur sofa, le suivant dans son mouvement afin qu’il reste toujours en contact avec sa poitrine, appréciant tout ce qu’elle lisait dans le regard de l’ami d’Aidan. En parlant de ce dernier, elle ne put s’empêcher de lui prodiguer un large sourire en passant à côté de lui, s’éloignant d’une démarche chaloupée. « Profite-en pour te vêtir un peu. » grogna ce dernier. Elle savait exactement où appuyer là où ça faisait mal et avait bien l’intention d’aller jusqu’au bout de son idée. Il était hors de question qu’elle ne prenne part à tout ce qui composait désormais la vie de son ami d’enfance, de son meilleur ami, de son colocataire, de son amant, de son âme sœur, de son créateur. Son regard dériva sur les trois lignes blanches sur son bras. Les mois avaient passés et les cicatrices s’étaient estompées mais elles restaient toujours présentes sur sa peau laiteuse. La tristesse envahit son regard. Pour autant, elle ne regrettait pas un seul instant l’avoir suivi dans les bois. Maintenant, il était coincé avec elle et ne pouvait plus l’éloigner, quant bien même il tentait de le faire pour des raisons dont il était le seul à connaître et qu’elle pouvait à peine dessiner. Et ne voulait pas dessiner.

Revêtant un simple short en jean court, elle glissa ses longues jambes dans des chaussettes hautes et se présenta dans le salon avec trois bières qu’elle présenta aux hommes avant de s’installer volontairement à côté de Jeremy, se tournant entièrement vers lui, jouant avec ses cheveux. Il était hors de question qu’Aiden la mette de côté ou ne pense à quelqu’un d’autre. Elle n’hésiterait pas à utiliser les grands moyens pour le lui faire comprendre et/ou se venger. Peu importe que les jours de Jeremy soit désormais comptés.